Drôle de politique

Publié le 18 Mars 2010

Mardi dernier, vers 10 heures du matin j'ai reçu un coup de fil m'annonçant la fermeture, dans la journée, avec le concours des forces de l'ordre, du squat/bidonville situé rue Jules Guesde à Floirac, dans la banlieue de Bordeaux.

Comme à leur habitude, les rroms bulgares installés dans ce bidonville avaient brûlé des câbles pour en extraire le cuivre et cela faisait de la fumée.

Devant la gravité de la situation, je me suis rendu sur place un peu avant midi et j'ai passé un bon savon aux rroms, leur expliquant que cela créait des nuisances pour les voisins et que cela allait leur attirer des ennuis avec les voisins et avec la mairie. Ils m'ont promis de ne pas recommencer, promesse qui n'a pas tenu 24 heures.

Vers midi j'ai donc contacté le directeur de cabinet du maire de Floirac pour lui dire que le feux était éteints et qu'il n'y avait plus de raison pour expulser. Il m'a alors dit qu'il avait un autre problème puisque une dizaine de rroms étaient dans le hall de la mairie.

Cinq minutes plus tard j'étais devant la mairie avec le directeur de cabinet et les rroms. Le problème cette fois venait d'un autre squat (Gaston Cabannes), évacué la veille par d'autres rroms qui se sont installés dans un squat quatre étoiles à 300 mètres du premier. Mais ils ne voulaient pas de la dizaine qui était devant la mairie.

Le directeur de cabinet s'est déplacé dans le nouveau squat et a été assez persuasif pour imposer le logement de tout le monde. Tout le monde sauf 4 personnes dont les autres ne voulaient absolument pas.

Comme toujours avec les rroms, la situation était compliquée. Très compliquée.

Je me suis retrouvé donc encore à 22 heures dans le bidonville, en train d'expliquer la situation aux rroms et pour négocier avec eux un éventuel déménagement pour permettre de raser le bidonville.

Le terrain où est situé le bidonville appartient à la CUB mais doit être rendu "propre" par la société Bouygues. Je ne connais pas les détails de l'accord (ou de la transaction) mais cela m'a été répété à plusieurs reprises.

En échange de la fermeture de l'évacuation du bidonville pour lundi matin (22 mars), j'ai demandé au directeur de cabinet de la mairie de Floirac de négocier avec la société Bouygues un don par chèque pour l'association que je préside en précisant qu'il ne fallait pas qu'il soit de 1000 €. sans autre précision.

Mercredi matin de bonne heure, le directeur de cabinet du maire me téléphone, tout énervé, parce qu'il s'était déplacé a Gaston Cabannes et qu'il y avait là dix familles qui lui auraient dit que c'est moi qui leur ai dit d'investir les lieux. Je lui ai proposé de venir sur place car je n'ai jamais ouvert un squat ni même donné une quelconque autorisation dans ce sens. Ni à Floirac, ni ailleurs.

A mon arrivée, le problème ne se posait plus. Nous avons discuté de nouveau des problèmes que rencontraient les voisins du squat, bien que cela ne ressorte que depuis le 15 mai, fin de la trêve hivernale. Il ne devait pas savoir que la trêve hivernale ne s'applique pas aux squats qui peuvent être évacués à n'importe quel moment de l'année. Dans l'après-midi, dans le bureau du directeur de cabinet, un nouveau problème très grave a surgit. Les rroms auraient séquestré, dimanche dernier, deux employés de la déchètterie gérée par Véolia. Des rroms ? Sur ? Non, il n'était pas sur... mais le squat n'est pas loin de la déchètterie. Mais les faits se seraient passés dimanche après-midi, les employés n'ont pas appelé la police et aucune plainte n'avait été déposée mercredi après-midi. mais ils (les employés) allaient la déposer. Vous avez dit bizarre ?

Revenons à la matinée. J'avais proposé au directeur de cabinet du maire de reloger dans les quatre maisons abandonnées par le premier groupe de rroms, les habitants des cabanes du bidonville, sachant qu'il ne serait pas possible de reloger tout le monde et qu'il faudrait trouver une solution de relogement pour une vingtaine de personnes. J'étais prêt à aller négocier l'installation de petits groupes dans d'autres squats de l'agglomération. Ce serait difficile mais je savais que j'y arriverais. J'avais donné ma parole pour que cela se fasse lundi matin.

Je connais bien le fonctionnement de cette communauté et j'ai une relation avec elle à la fois privilégiée et difficile de par le recadrage que je fais souvent lorsque les règles de vie en société ne sont pas respectées.

Mais le directeur de cabinet a eu une idée de génie. Il y avait à Floirac, pas loin du nouveau squat, une maison rose, appartenant à une société en dépôt de bilan. Vous savez, le monsieur qui rachetait les crédits et qu'on voyait sa tronche un peu partout sur les panneaux publicitaires. Mais il ne m'avait rien dit, bien sur. Sauf que nous sommes montés dans sa voiture pour aller voir la maison. Nous avons été jusqu'au rond point un peu plus loin et lorsque nous avons fait demi tour, il m'a dit qu'il me faisait visiter la ville, que l'entrée de Floirac était là. Ensuite il m'a parlé des maisons qu'on voyait. Mais il ne m'a jamais parlé de maison rose. Par contre, il a été jusqu'à me dire qu'il n'y avait pas de micro dans la voiture.

Je lui ai dit que je pouvais faire passer le message aux rroms, sans me mettre en difficulté ni devenir complice d'une effraction. Mais non, si les rroms se faisaient prendre, ils n'avaient qu'à dire que la porte était déjà fracturée. Mais bien sur, il ne m'a jamais parlé de maison rose. Il ne m'a pas non plus dit qu'il fallait dire que la porte était déjà fracturée.

Pourtant, après avoir fait le point du nombre de familles avec enfants, nous nous sommes encore vus de nouveau dans son bureau dans l'après-midi, en présence d'une tierce personne, qui nous a dit ne pas être d'accord ni avec ma demande de chèque pour mon association ni avec la solution de la maison rose.

Mais quelles étaient alors les solutions ? Deux possibilités, la première, l'évacuation par la force du bidonville, le dircab devant avoir une réunion avec les responsables de la préfecture. La deuxième solution, consistait à loger une partie des gens à Gaston Cabanes. Mais la mairie ne gérait rien. Elle ne trouvait pas non plus de relogement pour les vingt restants. En somme, je devais me débrouiller.

Mais il était scandaleux que je conditionne mon aide pour l'évacuation du squat au versement d'une aide par Bouygues à mon association. Autant je ne veux pas faire de demande de subvention publique pour garder ma liberté de parole, autant je n'ai aucun scrupule à prendre un chèque de Bouygues qui, comme d'autres promoteurs immobiliers, profitent largement des marchés publics. Dans ce cas, le projet s'élève à plusieurs millions d'euros, s'agissant d'un groupe scolaire, de logement et dans le prolongement, du fameux projet Arena. Cela ne vous dit rien ? Si, si !

Nous nous somme quittés en milieu d'après-midi, n'ayant plus rien à nous dire, paraît-il.

En sortant de la mairie de Floirac, j'ai donc informé la mairie de Bordeaux que la fermeture du bidonville entraînerait l'arrivée d'une centaine de personnes dans le squats de Bordeaux. J'avais aussi alerté les journalistes qu'il pouvait y avoir du mouvement ce matin.

Je me suis donc rendu à Gaston Cabannes ce matin, des fonctionnaires de la CUB étaient sur place ainsi qu'une entreprise de démolition avec une pelleteuse.

Les journalistes sont arrivés peu de temps après. Prises de vues, photos et voilà qu'un élu de la mairie arrive, accompagné du directeur de cabinet et de la police municipale. Nous avons été priés de quitter les lieux. Pourtant, là où nous étions, il n'y avait aucun danger pour nous. Après cela, le site a été sécurisé, mais mon oeil curieux a remarqué une chose. Le permis de démolir n'était été affiché. Je ne connais pas grand chose à la loi mais il me semble que c'est obligatoire. Pourquoi la CUB ne l'a-t-il pas affiché ? Et puis, quand est-ce que la décision de démolir a vraiment été prise ? Y avait-il un permis de démolir ?

Je voudrais revenir sur ce qui a été le prétexte pour ne pas loger les gens dans ces maisons, à savoir l'aide que j'ai demandé à une société privée. Pourquoi le directeur de cabinet en a été choqué ? Je suppose que Mme le maire est sur la même position. Mais puisqu'on parle de bulgares, pourquoi Mme la députée-maire n'a-t-elle pas été choquée par le départ des 200 bulgares en avion, payé par le contribuable (entre 500 000 et 600 000 €) et auxquels ont a donné 300 € d'argent de poche  (encore entre 55 000 et 60 000 €) ?

Est-ce que Mme la députée-maire s'est indignée ? Est-ce qu'elle a été choquée ? Est-ce qu'elle s'est exprimée là-dessus ? RIEN ! ABSOLUMENT RIEN ! PAS UN MOT !

Est-ce que Mme la députée-maire s'est scandalisée quand elle a vu la facture du nettoyage du site (environ 35 000 €) alors que les associations s'y opposaient et avaient proposé leur aide pour fermer le site au directeur de cabinet de la CUB ? Pourtant, elle s'est bien gardée d'en donner le chiffre aux riverains du squat. Nettoyer le site était une preuve de vouloir pérenniser ce bidonville. L'évacuer en relogeant ailleurs et laisser le soin à Bouygues de nettoyer aurait été bien plus raisonnable. Ah, encore Bouygues !

Est-ce qu'elle s'est indignée que hier vers midi, un homme ayant de graves problèmes de santé et qui cherchait une solution pour se reloger, a été placé en garde à vue au commissariat ? (A l'heure actuelle, n'ayant pas vu sa femme, je ne sais pas s'il est sorti).

Est-ce qu'un responsable politique ne s'indigne que lorsqu'une association, pour garder sa liberté de parole, ne fait pas appel à l'argent public et demande à des sociétés privées une aide financière ? Est-ce qu'une association doit être au service d'une mairie ou d'une société privée, leur rendre service pour que certains puissent faire leurs affaires, comme si c'était son devoir mais sans qu'il y ait une contrepartie ? Je ne suis pas là pour mener à bien les désirs ni d'une société privée ni d'un maire.

Franchement, mon association existe depuis cinq ans et à ce jour elle n'a pas reçu un seul centime d'argent public. Est-ce cela qui dérange de ne pas être à la botte des politiques ?

Depuis mardi, j'ai l'impression qu'on a cherché à me manipuler. Vu mon âge, je suis capable de m'en rendre compte et parfois de contrer ce type d'attitude qui n'honore pas ceux qui les utilisent. Je me demande quand même pourquoi il était si urgent soit d'évacuer le bidonville soit de démolir avant la fin de la semaine. Serait-ce à cause des élections ? Il ne peut pas y avoir urgence car les voisins des maisons détruites n'ont pas encore été évacués et peut-être même pas encore expropriés.

J'espère qu'on nous expliquera tout cela... Tiens, cela me fait penser qu'il faut que je vous parle de la MOUS...

Ci-dessous les photos des maisons détruites.
472.jpg
474.jpg
473.jpg
475.jpg477.jpg
Et voici les cabanes qui auraient pu être détruites...
282.jpg
187-copie-1.jpg
189.jpg



 

Rédigé par Mouette Rieuse

Publié dans #Immigration

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
P
<br /> Vous avez raison de dénoncer tout cela. Un maire socialiste qui laisse des gens dans de telles situations alors qu'elle aurait pu les héberger dans de meilleures conditions, c'est inacceptable<br /> !<br /> C'est à croire que laisser les bulgares dans le bidonville sert ses intérêts pour mieux les chasser.<br /> <br /> <br />
Répondre